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Témoignage

24 Novembre 2008 , Rédigé par groupe Proudhon FA Publié dans #Education

Témoignage :

 

Lundi 17 novembre 2008, 10h. 30,


Ecole des Métiers du Gers. Descente  musclée de la gendarmerie dans les classes. Je fais cours
 quand, tout à coup, sans prévenir, font irruption dans le  lieu clos de mon travail 4 gendarmes décidés,

Accompagnés  d'un maître-chien affublé de son animal. Personne ne  dit bonjour, personne ne se présente.

Sans préambule, le  chien est lancé à travers la classe. Les élèves sont  extrêmement surpris.

Je pose des questions aux intrus,  demande comment une telle démarche en ce lieu est possible.
 On ne me répond pas, j'insiste, on me fait comprendre  qu'il vaut mieux que je me taise. Les jeunes sont
 choqués, l'ambiance est lourde, menaçante, j'ouvre  une fenêtre qu'un gendarme, sans rien dire, referme
 immédiatement, péremptoirement.


Le chien court partout, mord le sac  d'un jeune à qui l'on demande de sortir, le chien
 bave sur les jambes d'un autre terrorisé, sur des casquettes, sur des vêtements. La bête semble détecter un
 produit suspect dans une poche, et là encore on demande à  l'élève de sortir. Je veux intervenir une nouvelle
 fois, on m'impose le silence. Des sacs sont vidés dans  le couloir, on fait ouvrir les portefeuilles, des allusions
 d'une ironie douteuse fusent.


Ces intrusions auront lieu dans plus de  dix classes et dureront plus d'une heure. Une trentaine
 d'élèves suspects sont envoyés dans une salle pour  compléter la fouille. Certains sont obligés de se
 déchausser et d'enlever leurs chaussettes, l'un  d'eux se retrouve en caleçon. Parmi les jeunes, il y a
 des mineurs.

 

Dans une classe de BTS, le chien fait  voler un sac, l'élève en ressort un ordinateur
endommagé, on lui dit en riant qu'il peut toujours  porter plainte. Ailleurs (atelier de menuiserie-charpente),
 on aligne les élèves devant le tableau. Aux dires des  jeunes et du prof, le maître-chien lance : « Si vous
 bougez, il vous bouffe une artère et vous vous retrouvez à  l'hosto ! »


Il y a des allées et venues  incessantes dans les couloirs, une grande agitation, je vois
 un gendarme en poste devant les classes. J'apprendrais par la suite qu'aucun évènement particulier dans
 l'établissement ne justifiait une telle descente.  La stupeur, l'effroi ont gagné les
 élèves. On leur dira le lendemain, dans les jours qui  suivent qu'ils dramatisent. Ils m'interrogent une
 fois la troupe partie, je ne sais que dire, je reste sans voix. Aucune explication de la direction pour le moins très complaisante. Je comprends comment des gens ont pu jadis se  laisser rafler et conduire à l'abattoir sans réagir : l’effet surprise laisse sans voix, l'effet surprise, indispensable pour mener à bien une action efficace, scie  les jambes.


Ensuite, dans la journée, je  m'étonne de ne lire l'indignation que sur le visage
 de quelques collègues. On se sent un peu seul au bout du  compte. Certains ont même trouvé l'intervention  normale, d'autres souhaitable. Je me dis qu'en 50 ans (dont 20
 comme prof), je n'ai jamais vu ça. Que les choses
 empirent ces derniers temps, que des territoires jusque là
 protégés subissent l'assaut d'une idéologie dure.
 
Ce qui m'a frappé, au-delà de  l'aspect légal ou illégal de la démarche, c'est
 l'attitude des gendarmes : impolis, désagréables,  menaçants, ironiques, agressifs, méprisants, sortant
 d'une classe de BTS froid-climatisation en disant : «  Salut les filles ! » alors que, bien sûr il n'y a que
 des garçons, les félicitant d'avoir bien « caché leur came et abusé leur chien ». A vrai dire des marlous,
de vrais durs n'auraient pas agi autrement. C'est en  France, dans une école, en 2008. Je me dis que ces
 gens-là, les gendarmes, devraient accompagner les gens, les  soutenir, qu'ils devraient être des guides lucides et  conscients. Au lieu de ça, investis d'un drôle de
 pouvoir, ils débarquent, on dirait des cow-boys, et
 terrorisent les jeunes.
Mercredi 19 novembre 2008

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